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Ouverture, par Dominique Ducard
Pendant longtemps, au cours de mes études littéraires puis linguistiques et sémiologiques, le nom d'Ignace Meyerson n'évoquait guère que la traduction de 1926 de la Traumdeutung de Freud. Puis ce fut la découverte du passionnant volume publié en 1968 par Jean-Claude Pariente aux éditions de minuit intitulé Essais sur le langage, qui réunissait un choix d'articles tirés d'un numéro exceptionnel du Journal de psychologie de l'année 1933, dirigé par Meyerson.
Mais c'est, beaucoup plus tardivement, à la lecture des Écrits, qui rassemble des articles de 1920 à 1983, à un moment où je me questionnais sur ce que je cherchais à comprendre dans les divers travaux où j'étais engagé, que j'ai trouvé matière à réflexion et à étonnement. Étonnement de l'ignorance où était tenue l'œuvre de Meyerson pour qui s'intéressait à des questions de langage et de signe. Les références à Saussure y sont fréquentes et Jacques Revel, lors de l'hommage de 1995, rappelait ce point fondamental : « Meyerson pense en termes relationnels et fait appel à une théorie du signe. Toute la réflexion sur les formes et l'activité symbolique est à prendre en compte ici (...). [« Psychologie historique et histoire des mentalités », Pour une psychologie historique. Écrits en hommage à Ignace Meyerson, PUF, 1996, p. 225)].
En 2001 j'ai repris l'article suggestif sur « Un type de raisonnement de justification » [Écrits. Pour une psychologie historique, Paris, PUF, 1983, pp. 208-220] dans une analyse sémiolinguistique d'un mode d'argumentation qui m'apparaissait, au travers de l'étude de discours politiques publics, tenir autant du raisonnement dit « en chaudron » que de la dénégation. Ce n'est que récemment que j'ai eu accès, grâce à la bibliothèque de Paris 12, au programme et aux résumés des exposés du colloque de 1962 sur le signe et les systèmes de signes, troisième colloque de Royaumont, après celui sur la couleur et celui sur la personne, du Centre de psychologie comparée, créé en 1952. Aucun des structuralistes et sémioticiens de l'époque n'étaient présents à cette manifestation ; on y rencontre des historiens de l'antiquité, des anthropologues, des théologiens, un esthéticien, un musicologue, des mathématiciens, des neuropsychiatres et, quand même, quelques linguistes (Mounin, Martinet, Mirambel, Gauthier). Meyerson ne s'intéressait en effet à la typologie des signes que dans la mesure où elle est une approche de ce que l'on peut appeler l'activité symbolique de représentation. « L'homme, dit-il, est tout entier du niveau du signe et du langage et du niveau du système de signes. » [« Remarques sur l'objet », Écrits, p. 289).
La connaissance de l'esprit humain passe ainsi, pour Meyerson, par l'étude des « classes d'expression » qui s'organisent en séries spécifiées selon les domaines d'application de la fonction psychologique. A la recherche de « quelque chose qui serait comme la grammaire commune de la fonction symbolique » [« Discontinuités et cheminements autonomes dans l'histoire de l'esprit » (1948), idem, p. 62] il a exploré des champs disciplinaires multiples, instaurant la confrontation des disciplines en principe méthodologique et épistémologique. S'il précise qu'« On voit mal la méthode qui permettrait d'approcher cette grammaire commune de la fonction symbolique, si elle existe », il n'a toutefois pas cessé de rappeler à quelles conditions la recherche était possible. Récusant les deux reproches parfois adressés à la sociologie d'être trop descriptive, en négligeant les phénomènes de représentation ou, à l'inverse, « d'aller trop vite à l'interprétation », il souligne qu'« Une étude de l'homme doit nécessairement être une séméiologie et une morphologie à la fois. », la règle d'interprétation critique permettant, par l'exigence de la prise en compte des formes et de la description précise de leur agencement, « de rendre les faits opaques, résistants à l'explication - c'est-à-dire à l'implication - spontanée, de contraindre le savant à l'effort. » [Les fonctions psychologiques et les œuvres, Vrin, Paris, 1948, p. 113]
Je vais donc laisser la parole aux « savants » qui m'ont semblé pouvoir témoigner de cet effort, par l'ampleur et la rigueur de leur œuvre.
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